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Point d'ancrage. 
La création des repères subjectifs en institution
4è journées du RI3 (Lille, 30 et 31 janvier 1999)

Avril 2000


Editorial, Jean-Pierre Rouillon

5

   

Ouverture

 

Présentation du RI3, Jean-Robert Rabanel

11

Les conditions de l’Autre et l’ancrage, Virginio Baio

19

Création du point d’ancrage dans le travail avec les parents, Ernesto Pichotka et Diana Bergovoy

27

Points d’ancrage sans le père, Alexandre Stevens

33

Du pire au rire, Jean-Marie Molle

39

Un marin, un petit roi ; et l’encre ?, Christine Carteron

45

Tralala !, Maïté Masquelier

51

Dal bidone al Villone, Daniele Maracci

57

Débats

63

   

Le corps imaginaire et ses objets

 

D’un Autre opaque absolu à un appui imaginaire, Béatrice Landaburu

75

D’un bord à l’Autre, Annick Collier

81

La « main » qui parle, Isabelle Hardy

85

Un point d’ancrage dans le désir, Hervé Damase

91

De «l’atelier» à la représentation théâtrale, Bruno Boussagol

97

Débats

101

   

L’identification... jusqu’au délire

 

« Je suis un inventeur », Viviane Durand

113

L’image comme point d’ancrage imaginaire, Raphaëlla Marrazzo

119

Construction d’une jeune schizophrène, Michelle Rassis

125

Bastien : monstre sauveur..., Stéphane Fellonneau

129

Pas de nouage entre le nom et l’image, Vincent Nicotra

133

Débat

137

   

L’Autre de l’institution

 

Révolution autour d’un point, Corine Lalondrelle

151

Quel Autre inventer pour l’ancrage du sujet ? Loretta Biondi

157

Prendre la mesure, Patrick Lejuste

163

Un non pour un oui, Guy Vanderputten

169

Meurtrie..., Véronique Robert

175

Débats

183

   

Lettre et signifiant

 

Antoine et le « coupe-coupe », Bertrand Geets et Nicky Vincent

197

Deux modes d’appareillage de la jouissance, Jacqueline Coeckelenbergh et Pascal Hennau

203

« Appelez-moi point barre barre », Ann Dumay

209

Albert le génie, Laurence Forlodou et Joëlle Tanguy

213

« Moi, je travaille tout seul... », Françoise Huvelle et Evelyne Lemaire

219

Débats

225

   

Les conditions de l’Autre

 

De l’objet prélevé sur l’Autre à la pratique à plusieurs, Denis Gérard

233

La petite fille à la chaise, Martin Egge et Cristina Grigoletto

237

Où se situe le caprice ?, Monique Damave et Vincent Hosselet

243

Un traitement en deux temps, Françoise Dewachter et Bernard Peckel

249

Seul mais « à plusieurs », Eric Streveler

253

Une partenaire-actrice, Marie-Ange Glorieux

257

Débats

261

   

Quatre point d’Ancrage, animé par Eric Laurent

 

Ce que Dieu a donné, Diana Bergovoy

271

Ancrage, savoir et énonciation, Bruno de Halleux, Fernando Mattozi et Eric Mercier

277

Conjoncture de point d’ancrage, Véronique Mariage

283

Un petit nid de paroles et d’écriture, Danièle Rouillon

289

Débats

297


 

Editorial, par Jean-Pierre Rouillon

Le Réseau International d’Institutions Infantiles, le RI3, fait partie du Champ freudien. Il a été créé par Jacques-Alain Miller en 1992.

Quatre institutions en font actuellement partie. Il s’agit de l’Antenne 110 de Bruxelles, du Courtil de Tournai, du CTR de Nonette et de Mish’olim de Tel Aviv. Ces institutions reçoivent des enfants, des adolescents et des jeunes adultes psychotiques. Elles s’orientent à partir de l’enseignement de Sigmund Freud et de Jacques Lacan.

Ces institutions ont chacune leur histoire, leur particularité.

Elles ont en commun la place centrale faite à la jouissance reconnue pour la clinique psychanalytique des psychoses et leur traitement, la particularité plutôt que l’idéal, l’objectif de faire admettre la particularité résiduelle par le maître.

Enfin, les travaux du Réseau trouvent leurs ponctuations lors des Journées organisées par le RI3 tous les deux ans. Les quatrièmes Journées du RI3, organisées par Le Courtil, se sont donc déroulées à Lille les 30 et 31 janvier 1999. Elles avaient pour titre : « Point d’ancrage : la création des repères subjectifs en institution ».

Ces quatrièmes Journées se sont construites autour d’une interrogation simple. Les sujets que nous recevons dans les quatre institutions du RI3 sont des sujets à la dérive. Ce sont des sujets psychotiques, des autistes ou des névrosés souffrant de graves troubles qui se présentent de façon désarrimée. Ne pouvant pas se soutenir de la métaphore paternelle, ils ne disposent pas du point de capiton qui permet d’ordonner l’existence, de construire l’espace et de poser la question de l’identité. Il n’est donc pas question d’en passer par le père pour leur donner des points de repère. La plupart de ces sujets ne disposent pas du discours pour régler leur rapport au monde et à la jouissance. Cette absence se traduit par de graves troubles de la conduite et du comportement : fugues, errances, passages à l’acte, etc.

Toutefois, l’expérience conduit à constater que la pratique à plusieurs en institution avec ces sujets permet d’obtenir dans la plupart des cas un apaisement, une pacification, une stabilisation. Le but de ces Journées consistait dès lors à prendre acte de ce fait en se livrant à un travail d’élaboration à partir d’une mise en série de cas cliniques.

Pour introduire aux exposés et aux discussions de ces deux journées, je ne souhaite pas me lancer dans une explication théorique compliquée tentant de saisir et de réduire les multiples instants de trouvaille et d’invention auxquels nous avons pu participer. Je souhaite plutôt essayer de vous faire partager l’ambiance qui a présidé à cette rencontre. Le sentiment qui vient en premier lieu, c’est l’enthousiasme qui a imprimé son mouvement à ce qu’il faut bien considérer comme un événement. A partir d’inventions des sujets accueillis dans des institutions et du désir décidé des intervenants à prendre la partie de la surprise, une nouvelle clinique est en train de se constituer : une clinique qui prend appui sur la psychose ordinaire, telle que Jacques-Alain Miller nous l’a définie.

L’affect qui vient en second lieu, c’est la joie. Ces Journées furent étonnement joyeuses et cette gaieté venait en contrepoint du sentiment qui habite souvent les travailleurs de la santé mentale, lorsque « c’est à la base, à la dure qu’ils se coltinent toute la misère du monde ». Il ne s’agit pas ici de rendre raison de cette joie mais d’indiquer qu’elle est le signe simple et sans prétention que s’était obtenu, lors de ces moments dont nous avons eu le témoignage, un effet de déségrégation. Elle est aussi l’indice de ce qui s’est transmis au un par un de la position éthique de ceux qui ont exposé leur travail. Elle permettait d’entendre combien le travail en institution peut être allégé si nous prenons au sérieux l’enseignement de Jacques Lacan ainsi que ce que nous enseigne le psychotique.

L’idée qui vient en troisième lieu, c’est d’avoir participé à une conversation qui nous a réunis en une véritable communauté de travail. Si la particularité et le singulier donnaient le ton du travail de chacun, si Eric Laurent a pu dégager le style qui donnait sa mesure à chacune des institutions du RI3, ces différentes partitions qui auraient pu chanter les louanges du multiple et du relativisme, ont au contraire fait résonner la musique de l’Un. Ce qui pouvait s’entendre à partir de la présentation de tel sujet se trouvait en résonance avec tel autre exposé, permettait de saisir ce qui était à l’œuvre dans telle autre situation. Mais surtout ce qui me semble au cœur de cette unité, c’est la volonté de transmission de ce que peuvent nous enseigner ces sujets que nous avons l’honneur d’accueillir dans nos institutions. Cette unité est aussi bien le signe de l’extraordinaire vitalité d’une clinique analytique se fondant non plus sur le sens, mais sur la jouissance.

Avant de vous laisser vous-mêmes, je l’espère, gagner par la joie et l’enthousiasme qui ont marqué cette rencontre, avant de vous laisser prendre part à cette conversation qui nous a réunis, je souhaite vous dire quelques mots de la prochaine rencontre à laquelle nous vous invitons. Les prochaines Journées du RI3 auront lieu en février 2001 à Bordeaux et auront pour thème la question du temps en institution.

Travailler la question des points d’ancrage nous a permis de saisir comment un sujet pouvait s’arrimer en institution à partir de la contingence d’une rencontre. Le point d’ancrage nous introduit aussi à la faveur d’un point qui fait marque à la question du temps en institution. Comment peut se décliner pour nous une logique du temps qui ne se réduise pas à celles qui ont cours dans la plupart des institutions, à savoir celle du développement pour les enfants et celle de la chronicité pour les adultes ? Comment faire valoir « encore » une logique du temps se fondant sur la surprise et sur l’invention propre au sujet ? C’est le pari que nous devons relever si nous voulons parer à l’effet de ségrégation que produit tout accueil au long cours en institution dès lors que celle-ci ne prend pas acte du fait que le sujet est avant tout réponse du réel.

 

 

Jean-Pierre Rouillon
Avril 2000